Début de l’hiver 1916. La Grande Guerre fait rage depuis deux ans. Alors qu’à Moscou, l’inquiétant Raspoutine s’apprête à partir pour une mystérieuse quête, beaucoup plus à l’Ouest, dans le ciel français, une myriade de dirigeables allemands se dirige vers Paris. Commandée par l’oberstleutnant von Deck, cette flotte compte à son bord quelques fortes personnalités, comme Adolf Hitler, capitaine du vaisseau-amiral, et le hauptmann Goering, l’as allemand en charge de la protection du convoi. Une impressionnante armada que l’aviation de chasse française, poussée par les exploits du héros Guynemer, va se faire un devoir de neutraliser…
Fort du succès de l’excellente série (bon, c’est vrai, le dernier album n’est pas terrible…) Wunderwaffen, le scénariste David D. Nolane repart sur les mêmes pensées uchroniques et nous propose ici sa version fantaisiste de la Grande Guerre. Dans Zeppelin’s War, les partisans du « plus léger que l’air » se sont fait entendre et l’aviation «historique » partage le ciel avec d’immenses navires volants servant à la fois de bombardier et de porte-avions. Dans cette histoire aux fragrances pulps et aux légères orientations steampunks, des personnages historiques croisent la route de mythes et de héros semi-légendaires, comme le mage Raspoutine, qui semble détenir quelques clés de l’histoire… et de l’Histoire. Adolf Hitler, lui, a quitté les tranchées où il avait fait ses armes pour se retrouver aux commandes d’un zeppelin, et affiche ouvertement sa foi païenne qui, sans nul doute, va faire entrer dans l’intrigue quelques éléments ésotériques et nordiques. Tout cela est servi dans un environnement extrêmement guerrier puisque la grande majorité des planches est consacrée aux combats aériens, et qui donne une importance toute particulière à la compétition entre les deux as Goering et Guynemer. Bref, c’est intrigant, incisif, mouvementé, mystérieux. J’adore.
Au dessin, Vicenc Villagrasa remplace Maza, l’artiste qui œuvre sur Wunderwaffen. Le coup de crayon de ce transfuge de chez Marvel est assez éloigné de celui de Maza – la série affiche donc une vraie personnalité – mais tout aussi efficace. Tout en jouant dans un autre registre. Moins axé sur la technique, plus chargé, plus sombre, le style de Villagrasa joue sur l’intensité des scènes et la nervosité du trait. Cela donne une atmosphère ouvertement « sauvage », qui colle parfaitement à l’ambiance agressive développée par le récit. L’ensemble reste cependant toujours très lisible, principalement grâce au choix d’une mise en cases traditionnelle, en gaufrier. De l’excellent travail.
Excellente entame de série que ce premier tome de Zeppelin’s War. En nous proposant une histoire aussi mouvementée qu’intrigante, David D. Nolane renouvelle l’essai réussi de Wunderwaffen, une série que j’apprécie tout particulièrement. On pourrait même penser que cette nouvelle création cache un potentiel plus important que la précédente, ce qui est, c’est certain, plus que prometteur.
A noter, en fin d’album, comme traditionnellement, un cahier bonus présentant les zeppelins et leur carburant révolutionnaire, le super-hélium.
Ma côte 5/5
Zeppelin’s War, tome 1 : Les raiders de la nuit
Scénario de David D. Nolane
Dessins de Vincenç Villagrasa
Couverture de Ronan Toulhoat
Paru aux éditions Delcourt – Juin 2014