Liliane et Fred Funcken sont légitiment célèbres pour leurs inestimables travaux dans le domaine de l’uniformologie à travers les âges. On leur doit notamment la fabuleuse collection Les uniformes et les armes au éditions Casterman, une série d’ouvrages d’une valeur documentaire toujours inégalée qui font encore de jours le bonheur des reconstituteurs (que ce barbarisme est laid !) et des figurinistes. Mais ce que les moins avisés (surtout les plus jeunes) d’entre eux ne savent pas, c’est que le couple Funcken a également œuvré dans le milieu de la bande dessinée belge, principalement pour deux périodiques, le journal Tintin et Spirou. De l’union de ces passions, l’Histoire militaire, le crayon et les bulles, naquirent quelques bandes dessinées thématiques. Plusieurs d’entre elles ont pour sujets des épisodes de l’histoire napoléonienne. Elles sont aujourd’hui toutes réunies dans un recueil des éditions du Lombard, intitulé tout simplement… Napoléon.
C’est en me baladant dans les allées de la FNAC que j’ai découvert l’ouvrage. J’ai immédiatement été attiré par la magnifique couverture, montage réalisé à partir d’illustrations de Fred Fucken. Séduit par le luxe de cette intégrale, je n’ai pas longtemps hésité à investir les 25 euros nécessaires à son achat. Une somme qui, au regard de la qualité de l’ensemble, apparait comme bien modeste. Fort de 168 pages, Napoléon condense un dossier biographique de Jacques Plessis sur les Funcken et leur « disciple » Yves Duval, où il explique notamment le processus de création de Waterloo, bande dessinée « vedette » de ce livre, deux longs récits (Waterloo et Le sultan du feu) et quinze histoires plus courtes (la plupart scénarisées par Duval) parues dans le journal Tintin entre 1953 et 1966.
Réalisées dans les années 90, les BD Waterloo et Le Sultan du feu, en plus d’aller plus en profondeur dans le déroulement des événements que les petites histoires du journal Tintin, mettent en lumière les avancées obtenues lors des études réalisées entre 1950 et 1990. On peut en effet comparer le récit de Waterloo écrit en 1953, qui présente de nombreuses erreurs historiques aujourd’hui corrigées, et l’histoire en 48 planches mise en forme au début des années 90, qui colle parfaitement aux interprétations actuelles. La deuxième longue histoire, Le sultan du feu, raconte l’expédition, passionnante et pleine de péripéties, du général Bonaparte en Egypte. Pour la construction de ces deux récits, Liliane Funcken a introduit dans les scénarios deux personnages fictifs, qui vont se poser comme des témoins des événements. Une méthode classique, mais toujours efficace. Waterloo et Le sultan du feu, comme l’on pouvait s’y attendre, brillent par leur richesse documentaire dans le domaine de l’uniformologie mais, attention, le talent de Fred Funcken ne s’arrête pas là ! C’est aussi un grand raconteur d’histoire. Il le prouve ici avec des scènes de bataille pleine de dynamisme, parfaitement lisibles.
Curiosités que ces planches parues dans le journal Tintin dans les années 50 ! Je n’étais alors pas encore de ce monde. Je ne les ai donc pas connues et cela a par conséquent éveillé mon intérêt. Travaux ludiques et pédagogiques, ces quinze histoires qui présentaient à un jeune lectorat un personnage de l’histoire napoléonienne ne présentent pas, un demi-siècle plus tard, un gros intérêt documentaire – sauf pour les étudiants ayant pour option l’histoire de la BD (avec de superbes démonstrations de ligne claire !). Ce n’est néanmoins pas sans un grand plaisir que j’ai suivi ces petits exposés graphiques et biographiques sur Murat, Bernadotte, Wellington, Ney ou madame Sans-Gène. Des gentils travaux de vulgarisation qui ont même fait office, pour mon cas, d’agréables piqures de rappel.
Ma note : 5/5
Napoléon
Scénario de Liliane Fucken, Yves Duval
Dessin et couleur de Fred Fucken
Dossier de Jacques Plessis
Paru aux éditions Le Lombard – mai 2015
168 pages -25,5€