t-34sConsidéré à juste titre comme l’un des meilleurs chars de la seconde guerre mondiale, le T-34 apparaît aujourd’hui comme l’une des icônes de l’armée rouge. A la fiabilité, le T-34 ajoutait un blindage satisfaisant et un armement très convenable, ainsi qu’un aspect pratique dans son emploi et sa maintenance, cette dernière étant facilitée par la standardisation des pièces détachées. Si le T-34 équipa de 1941 les divisions blindées soviétiques et que certains étaient encore en service dans les années 70, au sein des armées de petits pays alliés à l’URSS, il n’était pas pour autant une arme ex nihilo. Il fut le fruit d’une étude mûrement réfléchie… et intelligemment pensée.

 

LES ORIGINES DU T-34

Pour retracer les origines du T-34, il faut remonter au début des années 30. A cette époque, les Soviétiques cherchent à concevoir un char qui épouse les mêmes caractéristiques que les chars américains M1928 et M1931 conçus par l’ingénieur J.W. Christie. Ce sera le char rapide BT-5, qui sort des usines de Kharkov en 1931. Comme ses équivalents américains, le BT-5 est un char polyvalent, capable de se mouvoir en tout terrain (modèle chenillé) ou sur route (modèle avec roues caoutchoutées). S’il n’innove en rien, le BT-5 est un char bien pensé, bénéficiant d’un moteur souple et puissant (400 ch. pour une vitesse max de 52 km/h en chenilles et 75 km/h sur roues), d’un blindage incliné, d’une tourelle assez confortable et d’un armement satisfaisant pour l’époque (un canon de 45mm sur tourelle et une ou deux mitrailleuses de 7.62mm sur le châssis). C’est les qualités de ce BT-5, et son évolution (le BT-7, ou on abandonne le montage par rivetage pour le soudage)  qui serviront de base de réflexion lors de la conception du T-34.

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En 1934, l’état-major soviétique songe à remplacer le T-28, un char moyen à tourelles multiples mis au point en 1931 mais concrétisant une philosophie de combat obsolète (notamment la séparation des postes de combat, idée complètement dépassée). Trop lourd, trop lent, avec une silhouette trop exposée au feu, le T-28, malgré quelques innovations, ne convainc pas et on lui cherche rapidement un remplaçant.  Cela sera le T-34. Pourtant, dans un premier temps, les ingénieurs soviétiques pensent à une amélioration du char rapide BT-7-M, qui innove la gamme par son moteur diesel V-2. Mais, rapidement, l’idée de mettre en fabrication un modèle plus puissant, pouvant porter le canon de 76,2 mm du T-28, fait l’unanimité. Et on abandonne également la piste du modèle à roues pour se concentrer sur le modèle chenillé.

S’il profite de tous les atouts du BT-7, comme le blindage incliné et la suspension Christie, le T-34 est un char bien différent, qui nécessita une étude et des essais rigoureux et si, en 1939, la production est ordonnée, elle est retardée par de nouvelles améliorations effectuées suite à des observations effectuées sur les théâtres d’opération espagnols, polonais, mandchoues et finlandais. On peut résumer ainsi, de manière non exhaustive, le cahier des charges du T-34 :

Un blindage incliné pour protéger les chenilles en les recouvrant (vulnérabilité moindre contre les antichars).

Une construction en série des éléments pour faciliter les réparations.

Des pièces et des équipements simplifiés et standardisés.

De larges chenilles pour répartir le poids du char de façon équilibrée.

Une vitesse élevée pour franchir sans difficultés les obstacles tels que les côtes.

Effacer les « coins à obus » en profilant caisse et tourelle

Des roues à bogie type Christie (facilité de réparation et blocage évité en cas de gel)

Une motorisation diesel

Une direction simple (en jouant sur les freins et l’embrayage)

La production fut lancée au début de 1940 aux usines Kirov de Stalingrad et les premiers sortirent peu après la guerre russo-finlandaise (mars/avril 1940), c qui signifie qu’ils n’ont pas été observés sur un théâtre d’opération avant l’attaque allemande de juin 1941.

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LES CARACTERISTIQUES DU T.34

Comme le BT-5 en son temps, le T-34 n’invente rien. Par contre, il intègre toutes les dernières améliorations et innovations dans le domaine. L’accent est mis sur la facilité d’entretien. Les chenilles, très larges ((pression au sol réduite et facilité de déplacement en terrain neigeux ou boueux), sont aisées à changer. Les  roues jumelées sont à suspensions indépendantes (confort et rapidité en tout terrain) et la caisse, fortement blindée (45 à 60mm), est soudée sauf au niveau du bloc moteur afin de faciliter l’entretien. Véhicule totalement profilé et au blindage incliné, le T-34 est très résistant face aux tirs ennemis. De plus, le barbotin moteur est situé à l’arrière, ce qui rend le char moins vulnérable aux armes anti-char.

L’intérieur du char est partitionné en quatre sections, une cloison séparant le compartiment moteur et le compartiment de tir. A l’avant se trouve le poste de conduite, où sont installées les commandes de direction et de commande moteur. Le mécanicien-conducteur est assis à gauche et le tireur-radio à droite. Ce dernier sert une mitrailleuse DTM (blindée à partir de 1942) de 7,62mm qui peut tirer sur un axe horizontal de 24° et un axe vertical de -6/+12°. Le poste de tir se situe au milieu de la caisse et dans la tourelle, avec les soutes à munitions et les réservoirs de carburant. Il est occupé par le chef de char (pointeur-tireur) et le chargeur, qui servent un canon de 76,2mm semi-automatique à blocage de culasse automatique et une mitrailleuse coaxiale de 7,62mm. A noter que si la tourelle tourne électriquement, la hausse du canon est manuelle.

Les deux autres sections ne sont pas occupées par l’équipage. L’une contient le moteur, un V-12 diesel de 500 ch. refroidissement à eau, avec les systèmes d’allumage. L’autre est occupée par les systèmes de transmissions (embrayage, boîte de vitesse, etc.)

 

L’UTILISATION DU T-34

Il faut savoir qu’en 1941, alors que la production de T-34 est effective depuis plus d’un an et que les premiers modèles sont disponibles depuis mars 1940, le parc de blindés soviétiques est essentiellement composé de BT-5 et de BT-7. En fait, quand débute l’offensive allemande, sur les 15,000 chars de l’armée Rouge, on ne comptabilise que 967 T-34. La force de la percée allemande n’améliore pas les choses car cela oblige les Soviétiques à déplacer les usines de montage vers l’Oural, ce qui ralentit encore plus la mise en place d’une production de masse… qui débute en 1942, quand il devient nécessaire de remplacer les pertes subies durant toute l’année précédente. La production se concentre alors sur le montage de T-34. Lancé sur les champs de bataille du front Est, ce char moyen prend rapidement le dessus sur les blindés allemands, aux blindages plus légers.

En réalité, les allemands ne sont pas surpris. Depuis la visite de leurs usines par des responsables soviétiques et après avoir remarqué leur étonnement quand ils ont constaté que la gamme de chars moyens allemands étaient représenté par le « petit » panzer IV, l’état-major d’Hitler se doutait bien que l’URSS disposait d’un char plus puissant. Aussi, depuis, les ingénieurs nazis travaillent sur un char plus imposant (Guderian, lui, proposa tout simplement que l’on copie le T-34, il ne sera pas écouté). Cette nouvelle arme blindée sera le Panzer V Panther. Ce redoutable prédateur d’acier ne sera cependant disponible qu’à partir de 1943, à Koursk .

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En attendant la sortie des Panthers,  les Allemands doivent faire face à des vagues de T-34 avec des moyens limités. S’ils y parviennent, et remportent même quelques belles victoires, cela est principalement dû à leur supériorité tactique dans l’emploi des blindés. Encore privés de radios, les premiers T-34 foncent droit devant et se jettent en masse sur un ennemi plus prompt à réagir et manœuvrant mieux. Une technique de l’élastique qui permet aux équipages de Pz IV d’encaisser les coups en attendant de disposer de montures plus puissantes. Cela arrive enfin en 1943. Mais, entre temps, les Soviétiques ont également progressé, par l’apport de la radio, certes, mais aussi, par la combinaison infanterie-blindé, et surtout par le nombre, un avantage que les derniers nés allemands, Panther et Tiger, n’ont pas réussi à compenser. Au final, l’URSS aura lancé 29,698 T-34 dans la bataille. Comme la plupart des blindés, ils bénéficièrent de nombreuses améliorations  et variantes, parmi les plus notables :

En 1941, le T-34/76 est équipé d’un canon de 76,2mm, pouvant percer un blindage de 48 à 69mm à des distances variant de 2000 à 5000 mètres.

En 1942, le modèle T-34/76B est équipée d’une tourelle moulée, qui améliore sa résistance aux anti-chars.

En 1943, le modèle T-34/76C bénéficie d’un blindage amélioré, ainsi que d’un système optique plus performant.

Toujours en 1943, les modèles T-34/76D et T-34/76 E voient leurs tourelles modifiées – plus vastes, avec la pose de deux trappes circulaires sur le toit.

En 1944 sort le T-34/85, avec une nouvelle tourelle et un canon de 85mm à grande vitesse initiale. Bien que plus lourd, nécessitant un homme d’équipage en plus, le T-34/85 est un blindé très mobile, équipé d’un armement redoutable pouvant percer 100mm de blindage à 1000m. Il devient le standard de la fin du conflit.

 

La production du T-34 est stoppée en 1964. L’URSS en aura fabriqués plus de 41,000 exemplaires.