Énorme succès de la télévision britannique lors de sa diffusion durant les premiers mois de l’année 2016, War and Peace est une énième adaptation du best-seller de Tolstoï paru entre 1865 et 1869, et qui raconte les destinées de cinq familles russes durant les guerres napoléoniennes.
Ainsi, presque dix ans après la mini-série « européenne », de facture moyenne, réalisée par Robert Dornhelm, les Weinstein et la BBC remettent le couvert avec une nouvelle vision qui se revendique comme luxueuse, spectaculaire… et un brin provocante ! Oui, car si War and Peace respecte dans ses grandes lignes l’œuvre du romancier russe, les producteurs ont tenu à la rajeunir avec un traitement qui allie le style « so british » et l’aspect racoleur emprunté aux séries à succès produites par HBO et autres Netflix. En effet, pour attirer le chaland, Tom Harper, le réalisateur, n’hésite pas à pimenter son récit à grand renfort de scènes « osées », quitte à prendre quelques libertés, jugées sacrilèges par les aficionados de l’œuvre, comme la mise en forme d’une relation incestueuse entre Anatole et Hélène – qui évoque les liens sulfureux liant Jaime Lannister et sa sœur Cersei dans la série Game of Thrones, le monstrueux succès de HBO.
Cependant, n’en déplaise aux puristes, qui ne jurent que par le respect des œuvres originales, il est indéniable que les politiques menées par ces studios ont contribué ramener vers l’Histoire sur les petits écrans (qui sont d’ailleurs de plus en plus grands). Et tant pis si cela ne se fait pas sans quelques entorses (trahisons, diront certains) à une certaine règle d’intégrité – qui n’existe que dans leurs têtes. De Rome aux Tudors, en passant par Vikings, Downtown Alley, The Crown ou Outlander, autant de genres différents s’adressant à des audiences différentes, tous ces drames « historiques » ont redonné un souffle de vie aux personnages du passé… et ont contribué à leur bâtir une nouvelle popularité.
Avec ses décolletés vertigineux, ses scènes de sexe « explicites et ses relectures contemporaines, War an Peace suit la tendance et offre aux spectateurs une histoire au classicisme modernisé et sexué. Qu’importe. Extrêmement bien réalisée et interprétée (mention spéciale à Lily James et Paul Dano), avec ses magnifiques décors naturels, ses centaines de figurants et ses magnifiques costumes, la série, écrite par Andrew Davis (Orgueil et Préjugés, Bridget Jones, les Trois Mousquetaires) lie la tradition au modernisme et tient toutes ces promesses, avec un aspect pédagogique bien présent.
Au final, je ne trouve pas que War and Peace trahisse l’œuvre de Tolstoï. Au contraire, la série permet à une foule d’amateurs de grandes et belles histoires, dont beaucoup n’ont jamais lu, et ne liront jamais le roman, d’avoir un regard général sur l’Europe, et plus particulièrement la Russie, du début du XIX° siècle, quand bien même l’œil de Tolstoï serait déformé par le prisme d’une réalisation à l’anglaise un brin décalée.
A noter que la série, également diffusée aux Etats-Unis sur la chaîne History, a été achetée par France 2 à la fin de l’été 2016, avec une programmation initialement prévue pour la fin de cette année. Mais bon, toujours rien à l’horizon…
Ma note : 3.5/5
War and Peace (GB -2016)
Mini-série en six épisodes de 60 minutes réalisée par Tom Harper
Scénario d’Andrew Davies d’après l’œuvre de Tolstoï
Avec : Paul Dano (Paul Bezoukhov) ; Lily James (Natacha Rostov) ; james Norton (prince André Bolkonsky), Adrian Edmondson (Comte Ilia Rostov), Greta Scacchi (comtesse Natalya Rostov), Callum Turner (Anatole Kouraguine), Tuppence Middleton (Hélène Kouraguine), Stephen Rea (prince Vassily Kouraguine), Tom Burke (Flodor Dolokhov), Mathieu Kassovitz (Napoléon Bonaparte), Gillian Anderson (Anna Pavolovna)…