En l’an 1193, le pape Celestin III accordent des indulgences à tous ceux qui voudraient contribuer à l’évangélisation de la Livonie, qui est confiée à un clerc allemand, Albert de Buxhowden, neveu de l’archevêque des cités de Brême et Hambourg. En l’an 1198, alors que le pape autorise la création de l’Ordre des Chevaliers Teutoniques, chargé de protéger les pèlerins en Palestine, Albert de Buxhowden s’installe à Riga, capitale de son diocèse. Et un an plus tard, le nouveau pape Innocent III déclare la croisade en Terra Mariana (terre de Marie), autre nom de la Livonie.
De sa base de Riga, Albert de Buxhowden entame dés 1200 la conquête de la région. La progression est rapide, les fortifications lives, des constructions sur motte protégées par des palissades en bois, ne pouvant pas résister longtemps aux techniques poliorcétiques des croisés. Cependant, l’évêque va rapidement prendre conscience que cette facilité n’est qu’apparence. Utilisant la nature boisée du terrain, abandonnant la lutte ouverte, les Lives se lancent dans une « petite guerre » faites d’escarmouches et d’embuscades, usant les troupes croisées. De plus, la rigueur du climat fait que la troupe, une fois la campagne achevée, doit retourner vers ses bases arrière pour hiverner. Et, au printemps, tout est à recommencer.
Mais Albert de Buxhowden ne désarme pas. En 1202, il obtient du pape l’autorisation de créer un ordre militaire, qui prend le nom de Chevaliers Porte-Glaive. La mission de ces moines guerriers issus de la noblesse germanique est de mener à la fois des campagnes estivales mais également assurer le contrôle des territoires fraîchement évangélisés. Adoptant une stratégie qui est de bâtir une chaîne de forteresses le long de la Dvina, au fur et à mesure de leur progression vers l’intérieur du pays, les Porte-Glaive parviennent à pacifier la Livonie en une petite dizaine d’années, grossissant leurs effectifs au fil des conquêtes et des arrivés de renforts allemands (ainsi, en 1206, c’est 150 chevaliers qui contribuent à la prise de Holm, et en 1220, c’est une force de 4000 hommes qui se trouvent sous les murailles de Misse). En 1216, la mission est accomplie, les Porte-Glaive sont totalement maîtres de la région quand ils entreprennent la conquête de l’Estonie (qui sera soumise en 1223). Petit à petit, forts de leur succès, imitant l’attitude des autres ordres militaires, les Chevaliers Porte-Glaive s’émancipent de la suzeraineté de l’évêque de Riga, pour construire leur propre politique de conquête, au grand dam d’Albert de Buxhowden, qui, en 1218, trouve en Winno de Rohrbach, non plus un allié, mais un adversaire.
L’histoire des Chevaliers Porte-Glaive va cependant finir mal. En 1236, les Chevaliers Porte-Glaive, sous la direction de leur grand maître Foulques Schenk de Winterfeld, se sont lancés dans une nouvelle campagne, en Lithuanie. Son but est de grandir encore plus le prestige de l’Ordre, certes, mais aussi de renflouer les caisses, qui accusent un niveau dangereusement bas. En septembre, l’armée des Chevaliers Porte-Glaive (55 ritterburders et plus de 500 soldats et sergents), accompagnée de 600 croisés de l’Holstein (commandés par Heinrich von Dannenberg et Theodoric von Haseldorf), et 200 russes sous les ordres du prince de Pskov, se trouvent en Samogitie, près la cité de Siaulai, ou Saule. Au passage d’une rivière marécageuse, les croisés se voient harcelés par les Samogitiens. Refusant de combattre à pied et craignant de perdre leurs montures, s’ils se décidaient à les engager dans ce terrain boueux, les chevaliers allemands décident de camper pour la nuit. Le lendemain, les Croisés sont attaqués par une importante force lithuanienne. Le dos collé à la rivière, les chevaliers sont massacrés, alors qu’une grande partie des fantassins parvient à fuir. Pour les Porte-Glaive, le bilan est dramatique. Sur les 55 moines-soldats, 49 sont tués, dont le Grand-Maître de l’Ordre.
En 1238, les quelques Chevaliers Porte-Glaive encore en activité sont incorporés au Chevaliers Teutoniques, qui depuis 1225 sont responsables de la Prusse, sous une branche autonome baptisée titre d’Ordre de Livonie, ou Ordre Livonien. Les Chevaliers Porte-Glaive ont cessé d’exister.

ORGANISATION
L’organisation des Chevaliers Porte-Glaive est similaire à celle des Teutoniques et des Templiers. Au plus fort de leur puissance, les Porte-Glaive sont répartis dans six commanderies, chacune forte d’environ 300 hommes. L’Ordre emploie cinq types de combattants :
– Les Ritterbruders : les moines-soldats. C’est parmi eux que l’on nomme le Grand Maître de l’Ordre, ou Hochmeister. Ils sont soumis aux vœux monastiques, portent la barbe et les cheveux coupés court, et composent les officiers et les dignitaires de l’ordre. Ils portent une cotte de mailles et un heaume, ainsi qu’un manteau blanc qui les distingue des autres membres de l’ordre. Leurs montures sont parfois décorées aux couleurs de l’ordre. Leur effectif varie entre 100 et 150.
– Les Dienebruders : les sergents. Portant la cotte de mailles, le gambisson ou le surcot, ils portent le symbole de l’ordre (la croix et les glaives rouges) sur leur bouclier ou leur tabard blanc. Ils sont généralement habillés de couleur sombre (gris, marron). Ce sont les troupes régulières de l’ordre, pouvant agir en qualité de sergent à pied ou à cheval, d’arbalétrier ou de lancier. Ils vivent au côté des Ritterbruders.
– Les Mitbruders : les confrères. Ce sont des laïques qui vivent en dehors du monastère. Ils ne portent pas les couleurs de l’ordre mais peuvent arborer son symbole sur leurs boucliers.
– Les Gastritters : les hôtes. Ce sont les chevaliers accueillis par l’ordre, le temps d’une campagne. Ils sont les invités du Grand Maîtres. Ils portent leurs propres couleurs.
– Les Kreuzfahrers : les croisés. Ils représentent une grande partie de l’armée de campagne. Leurs origines sont diverses. On y trouvent des chevaliers issus de la noblesse germanique ou russe mais aussi des contingents auxiliaires levés dans la population locale (lives, lettons, lithuanies, russes, estoniens) ou dans les milices communales des villes d’Allemagne.