ORGANISATION DE LA GARDE PRÉTORIENNE

Comme nous avons pu le voir, le nombre de cohortes prétoriennes, ainsi que leurs effectifs, à varié au fil des siècles et des empereurs. De neuf à leur création sous Auguste, elles passèrent parfois à dix (sous Domitien), douze (sous Caligula et Claude) voire même, exceptionnellement, seize sous Vespasien. Pour ce qui est des effectifs, il est communément admis par les historiens qu’ils étaient construits sur le modèle des légions, à base de centuries de 80 hommes.

Généralement, une cohorte comptait six centuries, soit 450 hommes, mais certaines sources, comme les textes de Dion Cassius et de Tacite, annoncent des chiffres plus élevés. Ainsi, sous Vitellius, une cohorte prétorienne aurait bénéficié du confortable effectif de 1000 hommes. Durant certaines périodes, comme durant les règnes de Commode et de Septime Sévère, le système des centuries des cohortes prétoriennes passa du quingénaire au milliaire. Chaque cohorte alignait ainsi environ 1500 hommes.

Les cohortes prétoriennes étaient majoritairement composées d’infanterie, mais il y figurait également des détachements (turmae) de cavalerie (equites), forts d’une trentaine d’hommes. Bien que ces détachements, au nombre de deux par centuries, étaient appelés à opérer réunis en une seule unité, ils restaient attachés administrativement à leur unité d’origine.

LES SPECULATORES AUGUSTI

Au sein des Prétoriens, quelques trumae de cavalerie servaient comme garde rapprochée de l’empereur. Les speculatores augusti étaient commandés par un centurion (centurio speculatorum) mais restaient, comme les autres unités de cavalerie, administrativement rattachés à leurs cohortes d’origine. On ne sait rien sur leurs effectifs. Certains textes nous apprennent que leur tenue (notamment la forme de leurs bottes) permettait de les différencier.

LE SOLDAT PRÉTORIEN

diplome
Diplôme sur support en bronze remis aux prétoriens en fin de service (British Museum)

Le prétorien était généralement recruté parmi les légionnaires, les cohortes urbaines ou les cohortes de vigiles. On l’a déjà dit, le temps de service était moins long que dans la légion (16 années au lieu de 25). De plus, le légionnaire qui obtenait une « mutation » dans la garde conservait les acquis de ces années passées dans l’armée. Ainsi, si un légionnaire avec dix années d’ancienneté entrait dans la garde, il ne lui restait effectivement que six années à faire. A noter que si l’âge de recrutement dans les légions allait de 18 à 23 ans, il était plus large chez les prétoriens : entre 15 et 32 ans !

Pour ce qui était de l’origine des soldats, mettons de suite à bas une idée reçue. Les prétoriens n’étaient pas plus romains (comprenez originaires de la cité) que les autres légionnaires ! Bien au contraire ! Au cours de la dynastie des Julio-Claudiens, le recrutement s’effectuait surtout parmi les peuples italiens (Ombrie, Latium, Étrurie). Puis, on élargit le recrutement aux régions les plus romanisées de l’Empire. Ainsi, vers la fin du second siècle, en plus d’Italiens, on trouvait aussi parmi les prétoriens des soldats originaires de Norique, de Macédoine, d’Hispanie, etc. L’arrivée de Septime Sévère en 193 marqua un tournant. A partir de cette date, plus aucun Italien ne fut recruté. La garde prétorienne était alors composée d’anciens légionnaires originaires des régions romanisées les plus éloignées, comme les régions du Danube.

UNE SÉLECTION TRÈS EXIGEANTE

Par contre, tout le monde ne pouvait pas prétendre à entrer dans la garde prétorienne. Le postulant devait passer par une très sévère sélection (probatus). Pour avoir une chance d’être reçu, il devait être « en bonne condition physique, bien éduqué et issu d’une famille respectable ». Mais cela ne suffisait généralement pas, la présentation de lettres de recommandation était indispensable. S’il était sélectionné, l’heureux élu était assigné à une cohorte avec le grade de simple soldat (munifices). Au bout de quelques années de service, il pouvait obtenir une promotion et devenir immunis, un statut comparable au grade de soldat de première classe qui l’exemptait des corvées et lui confiait des tâches subalternes (techniques ou administratives).

LES OFFICIERS

Les soldats les plus méritants (ou issus des meilleures familles) pouvaient atteindre le rang de principalis, c’est-à-dire officier. La solde, bien entendu, était plus importante (au moins le double) que celle du simple soldat. Le principalis pouvait être porte-enseigne (signifer), messager (tesserarius) ou second du centurion (optio). La position de principalis dans l’état-major du préfet du Prétoire était la plus prestigieuse, et généralement réservée à aux membres des meilleures familles. S’il était remarqué, un principalis pouvait être nommé evocati augusti, un statut qui lui ouvrait des carrières d’instructeur, de centurion dans les légions, ou dans l’administration. En fin de carrière, s’il restait dans la garde, le principalis pouvait y être nommé centurion mais c’était une promotion assez rare car, très souvent, les centurions étaient des chevaliers ayant eu un accès direct à ce poste. Dans l’empire, l’on pratiquait sans scrupule la vénalité des offices.

LES TRIBUNS DU PRÉTOIRE

Chaque cohorte prétorienne était sous les ordres d’un tribun. Dans les premières années du règne d’Auguste, ces tribuns n’avaient qu’un seul supérieur : l’empereur lui-même. Puis, en l’an 2, Auguste créa la fonction de préfet du Prétoire.

Les tribuns étaient des romains de rang équestre qui avaient une très grande expérience militaire. Car pour accéder à cette fonction prestigieuse, il leur fallait accomplir un très long parcours professionnel. De manière générale (d’autres cursus étaient possibles), le futur tribun du Prétoire devait commencer sa carrière d’officier supérieur dans la garde prétorienne, avec le grade de centurion. Puis, après quelques années de service, il était nommé centurion supérieur (primus pilus) dans la légion (le primus pilus commandait la première cohorte de la légion), avec une durée de service d’au moins une année. Ceci fait, il retournait à Rome pour officier comme tribun dans les cohortes de Vigiles, puis dans les cohortes urbaines et, enfin, dans les cohortes prétoriennes.

Un tribun du Prétoire était nommé pour une mandature d’un an. En fin de mandat, il avait le choix entre poursuivre sa carrière ou, plus simplement, se retirer de la vie militaire pour embrasser une carrière administrative ou politique. Les tribuns issus des familles de chevaliers les plus influentes pouvaient atteindre le rang de préfet du Prétoire. C’était surtout le cas au début de l’Empire. Ensuite, les préfets du Prétoire furent plutôt des proches de l’empereur. Ce qui, souvent, ne les empêcha pas de les trahir.

EQUIPEMENT DE LA GARDE PRÉTORIENNE

relief arche de Claude
Relief de l’arche de Claude (musée du Louvre)

Comme ce fut le cas pour les légions, l’équipement de la garde prétorienne a évolué avec le temps. Par ailleurs, prétoriens et légionnaires étaient équipés de manière similaire, pour respecter des contraintes évidentes qui étaient liés à la fabrication. En effet, la tendance à l’harmonisation facilitait grandement le travail des artisans chargés de la conception des armes et des armures. Cela ne voulait pas pour autant dire que l’on était dans l’uniformisation, comme on peut le concevoir aujourd’hui. Principalement parce que le soldat romain était en charge de l’achat et de l’entretien de son équipement, et qu’il variait donc en fonction de l’épaisseur des bourses.

Bandes dessinées, films et séries télévisées nous présentent toujours des légions romaines alignant des soldats parfaitement identiques. Les recherches archéologiques récentes ont démontré qu’au sein de la même unité, il pouvait avoir des variations dans les modèles et les matériaux utilisés. Au final, si un effort était fait pour que les soldats aient l’usage d’armes similaires, il n’y avait probablement pas la même exigence pour ce qui est de l’harmonisation visuelle. Ainsi, contrairement aux idées cultivées durant longtemps, on sait aujourd’hui que l’auxiliaire pouvait, comme le légionnaire, porter une armure. Et il n’y a pas de raison que les prétoriens ne suivirent pas la même logique.

L’ARMURE

trajan arch
Prétoriens sur la colonne de Trajan (Rome)

Lorica segmentata, lorica squamata, lorica hamata… Tous ces modèles d’armure furent portés un temps par les prétoriens.

De nombreuses inscriptions datant des périodes de Trajan (98-117) et d’Antonin le Pieux (138-161) nous montrent des prétoriens équipés de cuirasses segmentées (lorica segmentata) ce qui tend à prouver que ce type d’armure lourde, bien connu des lecteurs des aventures d’Astérix, protégea pendant longtemps les légionnaires des attaques d’estoc et de taille. Par contre, on n’en trouve plus trace dès le début du troisième siècle. Plusieurs théories expliquent cet abandon progressif, comme le besoin de construire des unités plus légères (la cotte de mailles est plus aisée à porter que la cuirasse segmentée – même si elle est plus lourde à transporter en paquetage) pour lutter contre des adversaires jouant sur la mobilité. Quoiqu’il en soit, les recherches prouvent que même durant les deux premiers siècles, la lorica segmentata n’était pas le seul type de protection porté par les légionnaires… et les prétoriens.

La cuirasse d’écailles est moins citée, mais il est indéniable qu’elle fut souvent portée par le soldat romain. Et ce, pendant longtemps. Les descriptions de Dion Cassius ainsi que les reliefs présents sur la colonne de Marc Aurèle (érigée entre 170 et 190) nous prouvent que ce type d’armure fut utilisé durant le second siècle. On peut également observer sur l’arche de Constantin reconstituant la bataille du mont Milvius (28 octobre 312) des légionnaires et des prétoriens portant indifféremment des cuirasses d’écailles.

Le port de la cotte de mailles (lorica hamata) trouve ses racines dans la République et est d’inspiration celte. Ainsi, les légions de César, et avant eux, les triarii des guerres puniques, étaient équipés de cottes de maille. Avec le Principat, elle laissa une grande place aux lorica segmentata, plus efficace dans les tactiques de choc, sans toutefois disparaître de l’armée. Sur la colonne de Trajan, on peut voir plusieurs cavaliers et auxiliaires équipés de cottes de mailles.

Enfin, un peu de démystification. Pendant longtemps, l’on a cru que les prétoriens portaient de rutilantes cuirasses « musclées » évoquant les héros de la mythologie grecque. Cette croyance repose en grande partie sur quelques textes (comme ceux de Tacite) et certains reliefs comme celui visible au Louvre (relief dit des Prétoriens) où l’on peut observer des légionnaires portant ce type de cuirasses. Aujourd’hui, les spécialistes pensent que les personnages représentés sur ces reliefs étaient des personnalités importantes, préfets ou tribuns, et non pas des gardes prétoriens.

LE CASQUE

hageneauLe prétorien est souvent représenté portant un superbe casque attique avec son cimier orné d’une impressionnante crête. Malheureusement, les archéologues n’en ont jamais trouvé un seul lors de leurs fouilles. Il est donc probable que les casques à cimier visibles sur les reliefs (comme la colonne de Trajan) n’aient été que les résultats d’une convention artistique cultivée par des amoureux de l’art grec. Les spécialistes admettent cependant que ce type de casque pouvait être porté lors des cérémonies et des triomphes.

Les recherches archéologiques menées sur les sites publics et privés ont mis à jour un grand nombre de casques de confection simple, en tôle de bronze, équipés de protège-joues (paragnathides). Cela concorde avec de nombreuses inscriptions et reliefs visibles sur des tombes de prétoriens datant du début de l’empire montrant des soldats équipés de casque de type Montefortino. Ce type de casque italo-celtique équipait également les légions de la République et était dépourvus de couvre-nuque. De la même manière que le firent les légionnaires, les prétoriens suivirent l’évolution du Montefortino, comme le Hageneau avec son énorme protège-nuque,le Coolus, casque type du légionnaire de la période Julio-Claudienne, ou le luxueux casque en laiton Niederbieber (vers le début du troisième siècle).

LE BOUCLIER

chancellerie
Pretoriens, relief de la Chancellerie (Musée du Vatican, Rome)

Souvent, afin de bien différencier les Prétoriens des « simples » légionnaires, on use d’une convention artistique représentant les premiers équipés de boucliers ovales et les seconds de boucliers rectangulaires. La vérité est un peu plus complexe.

Il est vrai que l’utilisation de boucliers ovales par les Prétoriens est attestée dès les premières années de leur existence, alors que les légions privilégiaient le traditionnel bouclier rectangulaire (le scutum). Il suffit d’observer les nombres reliefs présents sur les tombes du site d’Aquilée. Opulente cité sous Auguste, il y stationnait une cohorte prétorienne. Les bas-reliefs trouvés dans les sous-sols de la Chancellerie, qui datent de Domitien (81-96), montrent également des prétoriens équipés de boucliers ovales. Pourtant, d’autres éléments laissent à penser que toutes les cohortes n’étaient pas équipées de boucliers ovales. Il existe des inscriptions et des reliefs datant de la période de Caligula (37-41) sur les lesquels figurent des prétoriens équipés de boucliers ovales alors que sur pièce de monnaie à l’effigie de l’empereur, ils portent des boucliers rectangulaires.

Histoire de brouiller encore plus les pistes, certains reliefs font apparaitre un troisième type de bouclier. Ainsi, sur colonne de Trajan, prétoriens et légionnaires sont équipés d’un même bouclier rectangulaire aux coins arrondis. Par contre, il semblerait que vers la fin du second siècle, l’usage du bouclier ovale se soit généralisé, à la fois pour les prétoriens et les légionnaires, sans que le scutum disparaisse totalement du paysage (on le trouve encore sur certains reliefs).

L’ARMEMENT

modèle de martiomarbuli
Modèle 3D de martiomarbuli

Sur la colonne de Trajan, aucune distinction n’est faite entre le prétorien et le légionnaire. Les deux sont équipés d’un javelot et d’un glaive de modèle espagnol sur le côté droit. Par contre, ils ne portent pas de dagues, contrairement à une période plus ancienne, où certains textes décrivent le soldat romain équipé d’une telle arme Durant le troisième siècle, les Romains étaient bien décidés à éviter le choc avec les armées barbares, l’armement évoluant en conséquence. Prétoriens comme légionnaires furent alors armés de lances d’environ 1m70 – en place et lieu du fameux pilum du Haut-Empire – et de courts javelots lestés de plomb (plumbatae ou martiomarbuli). Le glaive espagnol (gladius), s’il n’est pas prouvé qu’il fût complètement abandonné, se vit supplanté par l’épée germaine à double tranchant, la spatha, seulement efficace en coups de taille.

LA VESTURE

Prétorien en toge (Ara Pacis Augustae, Rome)
Prétorien en toge (Ara Pacis Augustae, Rome)

En service, le prétorien portait la tunique (paenula) coupée par une ceinture de type militaire et était chaussé de sandales (caligae). En campagne, les sandales se voyaient souvent substituées par une paire de calcei (chaussures fermées). Le soldat pouvait également renforcer ses caligae avec la pose de bandes molletières (fasciae crurales). Comme on peut le voir sur les bas-reliefs de la Chancellerie, ils pouvaient également revêtir par-dessus leur tunique une cape à capuche. En civil, le prétorien avait le grand privilège de porter la toge citoyenne lors de ses offices au Palais et au Capitole. Ce vêtement, réservé aux prétoriens, avait une valeur symbolique très forte.

LES SIGNES DISTINCTIFS

enseigne
Enseigne prétorienne (Palais Albani, Rome)

Au final, l’on se rend compte que l’équipement du prétorien n’était guère différent de celui du légionnaire. Il est probable, donc, que cette troupe d’élite se distinguait par d’autres moyens. En effet, en observant les reliefs ou en étudiant les textes anciens, l’on apprend que les prétoriens arboraient des enseignes spécifiques.

D’ordinaire, les légions étaient identifiées par une enseigne sur laquelle figurait un nombre variable de disques d’identification, surmontée d’une aigle. Le portrait de l’empereur (imagine) était bien présent au sein de la légion, mais porté sur un support dédié, confié à un imaginiferi (porte-portrait). Dans les cohortes prétoriennes, toute la symbolique était portée sur un même support. Ainsi, les enseignes prétoriennes visibles sur la colonne de Trajan, l’on peut distinguer des plaques d’identité, des croix honorifiques et deux imagines, le tout surmonté d’une aigle.

A côté de cela, l’on a découvert que les porte-enseignes prétoriens, qui étaient équipés de la même façon que ceux des légions, adoptaient le symbole du lion (masque de lion et peau de lion). L’on sait que les porte-enseignes des légions arboraient le symbole de l’ours (un peau d’ours qui couvrait leur casque et leur dos).

Enfin, les prétoriens possédaient leurs propres épisèmes sur leurs bouclier. Il est probable que chaque cohorte affichait un ornement de bouclier qui revendiquait son origine – sans que l’on ne puisse vraiment parler de système héraldique. Ainsi, sur les reliefs des monuments publics et privés, l’on voit des boucliers prétoriens décorés d’un sep de vigne, d’un ensemble éclair-tonnerre jupitérien (vu aussi dans les légions) ou d’un ornement lune et étoiles. Le plus fréquemment rencontré, cependant, est le symbole du scorpion.

L’image du scorpion est présente sur de nombreux reliefs, et les plus célèbres monuments romains. Il est également cité par les auteurs anciens comme le symbole des prétoriens. L’on sait par ces mêmes auteurs que les symboles adoptés par les légions dérivaient du signe astrologique de leurs fondateurs. Par exemple, les légions de César ont adopté le taureau, celles d’Auguste le capricorne et si les prétoriens ont choisi le scorpion, c’est probablement par que c’était le signe astrologique de Tibère. Il est donc fréquent de représenter aussi des unités de prétoriens équipés de scuta décorés avec des scorpions. Ce choix n’est pas une erreur, même si cela n’était probablement pas une généralité.

LES GARDES GERMAINS (GERMANIS CORPORIS CUSTODES)

Durant la dynastie Julio-Claudienne, les prétoriens partageaient leur mission d’assurer la sécurité du princeps avec les Gardes Germains. Pour justifier leur présence, il faut remonter à la seconde guerre civile. Durant cette période agitée, les belligérants préférèrent se voir protégés par des mercenaires, qu’ils jugeaient plus fiables que des citoyens romains. Ainsi, Octave se serait offert les services de trois unités de gardes-du-corps espagnols, remplacés, vers l’an 30 av. J.-C., par des germains d’origine batave ou rhénane. Ils étaient choisis pour leur physique impressionnant, apte à décourager les éventuels assassins. Plus tard, le recrutement s’effectua aussi en Gaule et, d’après certains textes, parmi les gladiateurs (durant les règnes de Néron et Caligula).

En l’an 9, suite au désastre de Teutobourg, Auguste renvoie les gardes germains. Nul doute que sa décision était motivée autant par un sentiment de rancœur que par la défiance envers les barbares. Cependant, en 14, Tibère reforme l’unité. Ces gardes germains, au cours de leur histoire, ne sont pas restés inactifs. L’on a vu plus haut qu’ils ont participé activement, commandés par Drusus, à la répression des mutins de Pannonie.

Du point de vue organisation, les Gardes Germains n’étaient pas une unité régulière. Ils n’étaient pas soumis à la même réglementation que les légions, ni à l’administration romaine. C’était une armée privée, payée par l’empereur. D’ailleurs, certains textes nous expliquent que, sous l’empereur Claude, plusieurs familles romaines, et même un officier (Statilius Taurus), possédaient leurs propres gardes germains. Quand ils étaient en service au palais, les gardes germains opéraient à pied mais en campagne, ils formaient une unité de cavalerie, organisée à la manière d’une unité d’auxiliaires, mais avec quelques petites différences mineures.

En fonction des circonstances, le nombre de gardes germains a dû varier. On sait cependant que, sous Néron, les gardes germains sont désignés sous le qualificatif de cohorte, donc un effectif d’environ 500 hommes.

Même si quelques inscriptions nous laissent penser que les gardes germains furent encore employés sous les Flaviens, leur existence « officielle » cessa en 68. Galba, le nouvel empereur, les renvoya car il se méfiait trop de ces hommes attachés à la dynastie précédente. Il faut dire que, sous Néron, ils servirent avec zèle et efficacité (ce sont eux qui mettent un terme sanglant à la conspiration de Pison).

LES GARDES A CHEVAL (EQUITES SINGULARES AUGUSTI)

L’histoire de ce corps d’élite est étroitement liée à celle de la garde prétorienne, et plus particulière à celle des Speculatores Augusti. Il est dit que leur fondateur fut Trajan (98-117) et qu’il s’agit de la réunion de plusieurs corps unités d’auxiliaires originaires des régions du Danube et du Rhin. Ces auxiliaires assuraient la sécurité des gouverneurs de province. Lorsque Trajan (alors gouverneur de Germanie Supérieure), quitte la frontière du Rhin et marche sur Rome, il est accompagné de ces cavaliers. Et une fois empereur, il décide de garder près de lui ces hommes dignes de confiance.

Originaires de régions diverses, parlant peut-être des langues différents, équipés suivant leurs traditions, les Equites Singulares Augusti formaient un ensemble hétéroclite et bigarré. Ils restaient d’ailleurs enregistrés dans les listes de leurs unités d’origine. Avant de rentrer au service de l’empereur, le cavalier devait servir au moins trois ans dans son unité de province. Ensuite, sur recommandation du gouverneur, il pouvait être nommé à Rome. A ce moment, bien qu’il n’ait pas effectué la durée de service minimum d’un auxiliaire (25 ans), il semblerait qu’il acquérait la citoyenneté romaine. Le recrutement était effectué sur un rythme régulier afin que l’effectif reste stable. Durant les guerres Daces, les Equites Singulares Augusti effectuèrent des missions de reconnaissance.

Leur organisation était la même que pour la cavalerie régulière (ala). L’unité était divisée en turma de 30 hommes, chacun sous les ordres d’un décurion. Le décurion était assisté de deux subalternes ; le duplicarius et le sesquiplicatius. Le commandement général de cette unité d’environ 500 cavaliers était généralement confié à tribun, parfois au préfet du Prétoire. Ils étaient logés dans une caserne sur le Caelius mais, sous Septime Sévère, une seconde caserne fut mise à leur disposition. On ne sait pas aujourd’hui les raisons exactes de cette initiative (augmentation des effectifs ?).

Il est à noter que les Equites Singulares Augusti étaient considérés comme des soldats d’élite. Aussi, souvent, ils étaient nommés avec le grade d’officier dans des unités de cavalerie sur les frontières de l’empire. Toutefois, leur mission première était de protéger l’empereur sur le champ de bataille. Ils furent donc de tous les campagnes dirigées par leurs chefs. Et même, à Rome, parfois, il leur fallait agir, comme lorsqu’ils sauvèrent Commode d’une foule d’émeutiers.

Les Equites Singulares Augusti disparurent des inscriptions et des textes vers le milieu du troisième siècle. On ne sait rien des raisons de cette disparition.