Knightfall, saison 1 (USA-2017)

La postérité n’a pas fait de Philippe IV, dit le Bel, un portrait très sympathique. S’il peut mettre à son profit une gouvernance qui a permis à une France, alors embryonnaire, d’asseoir une autorité et la mise en place d’une véritable administration, il laisse dans l’Histoire l’image d’un roi autoritaire et retord, un homme sans scrupule capable des pires actions pour alimenter les caisses de l’état. Il est celui qui supprima l’ordre du Temple, entra en conflit ouvert avec le pape et expulsa les Juifs du royaume. Bref, c’était pas vraiment un rigolo, le gars…

Prenant note de ce passé peu réjouissant, les producteurs de Knightfall ont décidé de pousser très loin le trait négatif de Philippe le Bel, pour faire de l’un des personnages centraux de leur show une véritable ordure. Ils élucident même le mystère qui entoure la mort de son épouse, Jeanne 1ere de Navarre, y trouvant dans le roi de France le coupable idéal. Ils échouent cependant à faire du personnage incarné par Ed Stoppard un homme de puissance totalement haïssable, par la faute d’errances dans la construction de son profil. On lui trouve même quelques circonstances atténuantes qui annihilent toute catharsis. Le méchant, il va donc falloir le chercher du côté du pape Boniface… Ou de Guillaume de Nogaret… Ou de la mocheté du show, la princesse Isabelle. Bref, une première saison abracadabrante qui, à trop vouloir en faire, sombre parfois dans le ridicule.

Historiquement, Knightfall n’a que peu de valeur. Rien n’est respecté, ou presque. Les scénaristes ont fait dans la digression romanesque, privilégiant le spectaculaire, faisant parfois fi de toute logique. Visuellement, c’est beau mais bourré d’anachronismes. Quand au récit, le scénario réduit au strict minimum les éléments historiques (l’entourage immédiat du roi, en oubliant toutefois quelques princes de sang), développe des sous-intrigues débiles (la séquence mettant en scène l’affrontement entre Jeanne de Navarre et sa cousine Elena de Catalogne est un summum de stupidité) et y introduit quelques personnages semi-fictionnels pour meubler une intrigue construite sur le concept de la quête du Graal. Un Graal convoité par le roi, son conseiller Guillaume de Nogaret (qui, historiquement, fut le principal ministre de Philippe le Bel), le pape Boniface VIIII, les Templiers, la secte des Assassins. Un monde fou, j’vous dit ! A cela s’ajoute une histoire d’amour interdit entre Landry, maître du Temple de Paris, et Jeanne de Navarre. En fait, dans Knightfall, l’anéantissement du Temple (même si la première saison ne montre pas cette destruction) est la conséquence indirecte d’une banale histoire de cul ! Oui, oui ! A noter également : la disparition pure et simple de personnages devenus encombrants (Parcival, Adelina…)

Par contre, côté réalisation, Knightfall remplit son objectif : la construction d’un drama spectaculaire au sein d’un décor médiéval à l’impact visuel fort. Avec ses solides chevaliers du Temple, ses mercenaires sans pitié et son roi macho, Knightfall transpire la testostérone. L’élégance, on la trouve dans la beauté d’Olivia Ross (Jeanne de Navarre), des décors très travaillés et une jolie photographie. L’action est bien présente (notamment dans l’épisode final), le casting est très solide. Derrière Tom Cullen, plutôt convaincant dans son rôle de moine-guerrier torturé par ses doutes et son amour pour Jeanne, on trouve une belle brochette de comédiens. Certains sortent du lot, comme Simon Merrells, superbe dans la peau du dévoué Tancrède, ou Nasser Memarzia, qui incarne l’attachant Draper.

En conclusion, si Knightfall pèche par son faible intérêt historique et les nombreuses failles qui plombent sa construction dramatique, la série reste agréable à visionner de par la qualité de sa réalisation et la solidité de son casting. On attends mieux, cependant, de la saison deux, dont le tournage débute à la fin du mois de mars.

KNIGHTFALL (USA – 2017)

Série créée par Don Handfield et Richard Rayner

Saison une: 10 épisodes de 60 minutes

Avec: Tom Cullen (Landry), Jim Carter (Boniface VIII), Julian Ovenden (Guillaume de Nogaret), Olivia Ross (Jeanne de Navarre), Ed Stoppard (Philippe IV), Sabrina Bartlett (princesse Isabelle), Bobby Schofield (Parsival), Amelia Clarkson (Sophie), Simon Merrells (Tancrède), Padraic Delanay (Gauvain), Nasser Mezarmia (Draper)