En juin 1812, la Grande Armée impériale, forte de 420,000 hommes, traversait le Niemen pour faire entendre raison au tsar Alexandre 1er. Six mois plus tard, c’est moins de 30,000 miséreux en guenilles qui repassaient le fleuve en sens inverse. La campagne de Russie, c’est une incroyable épopée de six mois qui a marqué l’Histoire par quelques faits mémorables ; la bataille de Borodino, l’incendie de Moscou, la retraite de Russie et le passage de la Bérézina. L’histoire d’une multitude condamnée par l’aveuglement d’un seul homme. »La bêtise de la guerre », comme l’a dit Victor Hugo.
En trois tomes, Bérézina raconte la tragique histoire de la Grande Armée. Cette adaptation d’un roman de Patrick Rambeau (Il neigeait, aux éditions Grasset, 2000, deuxième tome d’une trilogie impériale) est un récit à la belle précision historique qui donne une part belle aux reconstitutions de bataille et aux réunions d’état-major, mais qui doit également sa réussite à l’exploitation d’une galerie de personnages de fiction aux destins croisés– un officier de la Garde et son domestique, un groupe de comédiens, un secrétaire particulier -, un moyen judicieux pour faire découvrir au lecteur le quotidien de ces ‘’gens ordinaires’’ plongés dans des situations aussi dramatiques qu’extraordinaires.
En lisant ce roman graphique qui n’est pas sans rappeler les fresques historiques de Dumas ou Tolstoï, on se surprend à s’attacher à ces personnages, à partager leurs malheurs et leurs espérances, leurs peurs et leurs douleurs tout en suivant avec un réel intérêt les aspects plus historiques – le regard est exclusivement porté sur le camp français, et principalement sur Napoléon 1er et son état major. On alterne donc entre le récit purement documentaire et le romanesque, chaque élément nourrissant l’autre de sa force.
L’œuvre dit également sa puissance narrative aux dessins d’Ivan Gil et à la mise en couleur d’Elvire de Cock. Un rendu visuel emprunt de violence, aux traits forcés qui génèrent et entretiennent une atmosphère aussi glaciale que sanglante. Sous les coups de crayon d’Ivan Gil, la fière et imposante armée impériale va, après l’euphorie de la prise de Moscou, suivie par les incendies, se métamorphoser lentement en une pathétique colonne de morts-vivants – militaires et civils – soumis au morsures du froid, aux raids de cosaques et aux combats désespérés.
Une belle réussite.
BEREZINA
Scénario: Patrick Rambeau et Fedéric Richaud
Dessin: Ivan Gil
Couleurs: Elvire De Cock
Bérézina tome 1- L’incendie
Paru en janvier 2016 aux éditions Dupuis
52 pages – 15,50€
Bérézina tome 2 – Les cendres
Paru en août 2016 aux éditions Dupuis
52 pages – 15,50€
Bérézina tome 3 – La neige
Paru en mars 2018 aux éditions Dupuis
66 pages – 15,50€
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