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Mon intérêt pour l’histoire du Congo remonte à l’enfance. Il le doit principalement à un film de Jack Cardiff, Le dernier train du Katanga, découvert devant la télévision familiale, au début des années 70 (basé sur un roman de Wilbur Smith). Ce film, qui met en scène Rod Taylor dans le rôle d’un chien de guerre,plongé dans une intrigue brassant des éléments propres au film de guerre et au film d’aventure exotique, avait profondément marqué mon imagination, tant par ses aspects « bad ass » que par sa violence graphique assumé. Et depuis cette époque, le mot Katanga évoque  en moi une imagerie séduisante, pas toujours en accord, je l’avoue, avec la véritable histoire de la région.

Tant et si bien que, avec son titre évocateur, Katanga, une bande dessinée de Sylvain Vallée et Fabien Nury dont le premier tome vient de paraître aux éditions Dargaud, ne pouvait donc me laisser indifférent.  Le premier album nous invite à accompagner un groupe de mercenaires dans cette haute région du Congo, employé par l’UMHK (compagnie belge contrôlant les riches exploitations minières du Katanga) pour, officiellement, servir de conseiller militaire. Il est bien évident que leur véritable utilisation est d’une toute autre nature. A cela vient se greffer une sous-intrigue, mettant en scène un vol de diamants et un mystérieux domestique noir, Charlie, qui dévoile progressivement sa véritable identité.

Après quelques planches nous donnant un aperçu de la fondation du Katanga, exécutée au début du 19ème siècle à grands renforts de coups de machettes par un dénommé Msiri, les auteurs entrent dans le vif du sujet et nous entraînent dans un Congo plongé dans le chaos de la décolonisation.  Opérations barbouzes et attaques commando, ingérence et magouilles des casques bleus, tambouille politico-crapuleuse et espionnage à la James Bond composent cette histoire mise en forme par Fabien Nury. Un récit très accrocheur, exploitant de belle manière la fiction tout en respectant (et reconstituant) le contexte historique. Nullement gratuite, la violence, omniprésente, parvient à recréer l’atmosphère terrifiante et putride qui accompagna l’émancipation de ces régions africaines. Les personnages, l’étrange et inquiétant Charlie, Félix Cantor, le chef des mercenaires, Alicia, la belle espionne, Armand Orsini, le diplomate sans scrupule, tous sont les protagonistes réussis, acteurs d’un scénario passionnant, digne du cinéma d’aventure des années 60, celui de Lino Ventura et de Michel Constantin.

Au dessin, Sylvain Vallée parvient encore une fois (après le réussi Il était une  fois en France) à user  avec brio de son style caricatural pour donner vie à des personnages de fiction. L’exercice est difficile quand il est transposé dans un environnement historique, qui se veut foncièrement réaliste, et Sylvain Vallée se pose désormais comme un maître en la matière. Et si la force graphique de cette bande dessinée repose principalement sur l’exploitation de ses personnages, l’ensemble bénéficie aussi d’une belle mise en situation, d’une mise en cases efficace et d’une colorisation appropriée. Au final, fort de cette galerie de « sacrés gueules » de cinéma, Katanga, avec son récit empli de rebondissements, de suspense et d’actions guerrières très démonstratives (Sylvain Vallée n’hésite pas à l’être dans les scènes violentes), est, de mon point de vue l’une des meilleures parutions de cette première moitié de l’année 2017. Impatient de découvrir la suite !

KATANGA – Tome 1 : Diamants

Scénario de Fabien Nury

Dessin de Sylvain Vallée

Couleur de Jean Bastide

Paru aux éditions Dargaud (mars 2017)

73 pages – 16,95€

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